Rencontre avec Erika Velio - 2022

02 mars 2022

« Je pense avoir une bonne étoile »
 
« Je suis Erika Velio une cafrine de la Plaine Saint-Paul », c’est ainsi que se présente la jeune femme qui se tient devant les jeunes conseillers départementaux ce mercredi 2 mars. Vêtue de sa combinaison, on pourrait croire qu’elle se prépare à monter dans une fusée. On n’en est pas encore là. Erika fait mieux, elle est la mémoire grise qui permet que les fusées puissent être mises en orbite. L’ingénieur.e réunionnaise a pu échanger toute une journée avec les jeunes élus du Conseil Départemental Jeunes (CDJ). Erika Velio a également été reçue par le Président du Département et par Sabrina Tionohoué, conseillère Départementale déléguée à la Vie Educative.
 
Faire de son rêve une réalité, c’est ce qu’est parvenu à faire Erika Velio. « Ne jamais renoncer encore plus quand on est une femme » c’est l’un des nombreux messages qu’a voulu faire passer Erika Velio lors de sa rencontre ce mercredi avec les jeunes du CDJ. « J’ai été à votre place puisque j’ai été conseillère départementale jeune en 1996. C’est pour cela que je veux vous dire que si j’ai réussi à devenir ingénieure dans l’aérospatiale, vous aussi vous pouvez y arriver », explique-t-elle avec enthousiasme. Issue d’une famille modeste, son père est mécanicien, sa mère femme au foyer, l’école a été le moteur de sa réussite. « Le soir, je regardais le ciel et je me posais des milliards de questions. Et puis, j’ai voulu devenir mécanicien comme mon papa. C’est quand il m’a dit que ce n’était pas un métier pour une fille que j’ai eu envie de lui montrer qu’une fille pouvait faire le même métier qu’un garçon». Alors qu’elle fait un break pour s’occuper de ses 2 enfants, elle est sollicitée par Arianespace. Une aventure qui l’emmène en Guyane pendant 4 années où elle participe au lancement de nombreux satellites. « J’étais à la tête d’une équipe d’une quinzaine d’hommes. Nous étions chargés du lancement des satellites dans l’espace. »
Après cette expérience incroyable, Erika Velio s’installe aux Pays Bas. Elle collabore à mi-temps avec Airbus Defense Space. L’équipe travaille sur le projet Artémis.

 

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Ma mission, envoyer une femme sur la lune…
 
Une mission très symbolique puisque l’aboutissement sera de voir pour la première fois une femme marcher sur la lune. « C’est symbolique mais ça démontre que les femmes ont la même place que les hommes dans notre société. C’est un projet ambitieux puisqu’après 50 ans, la NASA a décidé d’envoyer de nouveau des astronautes sur la lune. Il y aura 4 astronautes dont une femme, c’est un autre grand pas pour l’humanité.».
 
 
 La place de la femme dans la société, un sujet qui lui tient à cœur  et qui n’a pas manqué d’interpeler les jeunes du CDJ. « Comment faites-vous pour allier votre travail et votre vie personnelle ? », « Avez-vous rencontré des difficultés à vous faire accepter dans ce métier très masculin ? »
Des questions qui ont emmené des réponses simples. « J’ai fait le choix de devenir professeur pendant une certaine période pour m’occuper de mes enfants. Aujourd’hui, j’ai ma maman qui vient aux Pays-Bas pour m’aider. Je suis une maman célibataire et il était important pour moi de passer du temps avec mes enfants. Ça n’a pas été simple mais il faut se battre et se dire qu’on peut y arriver. » Un parcours exceptionnel qui impressionne.
« Une fierté pour La Réunion et un modèle pour la jeunesse Réunionnaise » s’est exclamé le Président du Département, Cyrille Melchior. Un échange mêlé d’admiration pour ces deux Saint-Paulois. « Des échanges enrichissants pour les jeunes du CDJ », a précisé Sabrina Tionohoué, l’élue en charge de la Vie Educative.
Et des rencontres, il y en aura encore puisque Erika Velio à des projets pour La Réunion. « Quand je regardais par ma fenêtre, je voyais la voute céleste mais je voyais aussi les lumières de l’immense tour Oméga qui clignotaient. J’aimerais installer à cet endroit une reproduction de la Station Spatiale Internationale où a séjourné Thomas Pesquet. Je veux que tous les petits Réunionnais aient accès à l’espace. Des jeunes pourraient se former, apprendre et exploiter les données fournies par les satellites ou encore les missions spatiales. Ce sont eux les futurs ingénieurs et entrepreneurs de l’espace. » 

 

 

 

L'interview intégrale :

Erika Velio, de la Plaine Saint-Paul à la NASA

« Je suis Erika Velio une kafrine de la Plaine Saint-Paul », c'est ainsi que se présente la jeune femme qui se tient devant les jeunes conseillers départementaux ce mercredi 2 mars. Vêtue de sa combinaison, on pourrait croire qu'elle se prépare à monter dans une fusée. On n'en est pas encore là mais sa mission est aussi importante.
Erika Velio participe à la mise en orbite des satellites grâce aux fusées. L'ingénieurE Réunionnaise a pu échanger toute une journée avec les jeunes élus du Conseil Départemental Jeunes (CDJ).« J'ai été à votre place. J'ai été conseillère départementale jeune en 1996. Je viens vous témoigner que tout est possible, si j'ai réussi à
devenir ingénieur dans l'aérospatiale, vous aussi vous pouvez réaliser vos rêves ». Retour sur le parcours exceptionnel d'Erika Vélio, de la Plaine Saint-Paul à la NASA.

1/ Il faut toujours viser la lune, car même en cas d'échec, on atterrit dans les étoiles. Oscar Wilde. Vous pourriez faire de cette citation votre leitmotiv ?

Tout à fait, car après tout, cela veut dire qu'il est bien d'avoir de grande ambition pour pouvoir s'approcher de leur réalisation. Mais par dessus tout, je crois surtout que si nous nous en donnons les moyens nous pouvons choisir le métier et la vie qui nous plaisent, un travail qui est aligné avec notre talent naturel et avec notre potentiel, une
vie qui nous offre l'exploration, qui nourrit notre soif de connaître, de comprendre, de réaliser ou d'aimer.

2/ Vous pouvez nous parler de votre parcours et surtout de votre collaboration avec Arianespace ?

J'ai étudié une année à l'Université de la Réunion à St Denis jusqu'à ce que j'ai 18 ans et que mon père me donne la permission de quitter La Réunion pour aller étudier en métropole. A l'Université de Montpellier, j'ai préparé le concours d'entrée en Ecole Nationale Supérieure alors, j'ai intégré l'ENSCM avant de revenir dans un cursus universitaire pour obtenir une Maîtrise en Sciences Physiques et Chimie Moléculaire et Biomoléculaire. J'ai, ensuite, obtenu un Master en Sciences physiques et Techniques de la Matière et de l'Energie à l'Université de Toulouse. En commençant à travailler dans le domaine aéronautique je me suis formée et obtenu un titre d'Expert de Conduite de Génie Logiciel. Je n'ai jamais cessé de me former et de m'adapter au marché économique et technologique, alors, en 2019, j'ai aussi obtenu un Mastère Européen en Management et Stratégie d'Entreprise (_European Master's_ in Management And _Business Strategy)._

J'ai rejoint les équipes du monde du spatial, d'abord, via le CNES en tant qu'ingénieur qualité du programme de vol de la Fusée Ariane 5, puis, j'ai rejoint Arianespace en tant que responsable de suivi de production des boosters (Etage d'Accélération à Poudre d'Ariane 5, Zefiri de Vega). J'ai, ensuite, été promue Cheffe d'équipe en campagne de lancement à Kourou sur la base spatiale Guyanaise.

Depuis 5 et demi, je suis aux Pays Bas au sein d'Airbus Defense & Space. C'est ici que mon aventure à commencer avec le programme de la NASA Artemis. A Airbus, nous créons les panneaux solaires qui équiperont le module de service européen (ESM) qui fournira de l'énergie à la capsule et de l'oxygène aux astronautes à bord de la capsule Orion. Les panneaux sont des éléments techniques indispensables dans l'espace. Sans eux, les objets ne pourraient pas survivre ni se déplacer.

3/ Aujourd'hui vous travaillez sur le projet Artémis, une mission spatiale prévu en 2024 où pour la première fois une femme marchera sur la lune. Plus qu'un symbole une vraie révolution. Vous êtes fière de participer à cette aventure ?

Le programme Artemis se déroule en plusieurs phases. L'objectif est de retourner sur la Lune. Comme le programme Apollo où l'homme a marché sur la Lune. Nous voulons que ce soit une femme et une personne de couleur qui aille sur la Lune la prochaine fois.

Vous savez qu'en mythologie grecque Apollo et Artemis sont des jumeaux.

Cette année 2022, en juin, la première capsule Orion partira faire un tour de Lune à vide, ce sera la mission Artemis I.

L'année prochaine, une autre capsule partira avec à son bord 4 astronautes, de nouveau pour un tour de Lune, ce sera la mission Artemis II.

Puis, en 2024, ce sera pour un alunissage et un petit pas pour la femme mais un très grand pas pour l'humanité. Un symbole très marquant surtout dans notre société où les lois et les règles de la société changent très lentement pour donner une place équitable à la femme.

Vous l'aurez compris, il y a de nombreuses autres missions Artemis car nous allons utiliser la Lune comme une base pour aller vers Mars.
Chacune de ces missions ont un rôle dans la fabrication de la Lunar Gateway (un peu comme une station ISS autour de la Lune).

Le développement du module ESM a été confié à 26 entreprises. A Airbus Defence & Space Pays Bas, nous y contribuons aussi avec beaucoup de fierté en fournissant les panneaux solaires.

4/ Vous avez été Conseillère Générale Jeune et vous avez eu l'occasion de rencontrer les élus du Conseil Départemental des Jeunes, quel message leur avez-vous fait passer à l'occasion de ces échanges ?

J'ai rencontré une génération de conseillers déjà bien déterminés. J'ai partagé beaucoup avec eux mais je souhaite surtout qu'ils soient les porte paroles pour leurs camarades au sein de leur établissement scolaire pour que tous aient les mêmes chances de réussite de leur parcours de vie. Ces jeunes conseillers départementaux deviendront, je n'en doute pas, des ambassadeurs de notre île.